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« Des musées français courbent l’échine devant les exigences chinoises de réécriture de l’histoire et d’effacement des peuples »

Alors que la France veut se doter d’une loi visant à prévenir les ingérences étrangères, rien ne semble arrêter celles de la République populaire de Chine (RPC) dans deux de nos grands musées : le Musée du quai Branly et le Musée Guimet. Désormais, la terminologie employée dans ces institutions reflète les desiderata de Pékin en matière de réécriture de l’histoire et d’effacement programmé des peuples non han qui ont été intégrés ou annexés par la RPC, cela jusqu’à en perdre aujourd’hui leur propre ethnonyme et celui de leur territoire ancestral.
Ainsi, on ne peut que s’étonner de la suppression, dans le catalogue des objets tibétains du Musée du quai Branly, du nom « Tibet » au profit de l’appellation chinoise « région autonome du Xizang ». Cette modification n’est que l’application d’une loi en vigueur depuis 2023 en RPC et montre bien la volonté que le Tibet, occupé et colonisé depuis 1950, doit être rayé des cartes et des consciences, au présent comme au passé. Au Musée Guimet, « monde himalayen » a remplacé le toponyme Tibet dans les salles qui lui sont consacrées.
Pour rappel, si les dirigeants traditionnels des peuples du Tibet, du Turkestan oriental (Xinjiang) et de la Mongolie ont continué à gouverner leurs peuples dans le cadre d’allégeances aux empereurs mandchous, ces derniers ne régnèrent directement que sur la Chine proprement dite (dynastie Qing, 1644-1911). Les prétentions de la République populaire de Chine à occuper au profit de sa seule puissance ces territoires voisins du sien ont largement réussi aux dépens des peuples de ces territoires. Cela est connu des spécialistes, certes, mais probablement moins de ceux qui admirent les succès de la Chine contemporaine obtenus au prix d’une exploitation économique de ces territoires et d’une sinisation sans merci de ces peuples, grâce à la mise en place d’un régime dictatorial et de la domination démographique par les Han.
Le choix de nos musées, ainsi que de certaines de nos institutions universitaires qui abritent les relais de la propagande chinoise que sont les Instituts Confucius, est de ne pas heurter le régime de Pékin et sa sensibilité nationaliste exacerbée. Toute déviation du grand récit qu’encadre la nouvelle « pensée Xi Jinping » (sic) est jugée provocation ou tentative de séparatisme. Nos institutions veulent préserver à tout prix leur accès aux terrains de recherche, aux sources et aux archives chinoises, et bénéficier des largesses financières et des prêts d’objets muséographiques dépendant de la bonne volonté du régime chinois. Alors, on amadoue la puissance menaçante qu’est devenue la Chine de Xi Jinping et l’on courbe l’échine devant ses exigences de réécriture de l’histoire et d’effacement des peuples.
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